Retranscription vidéo : « Émission RTL+ sur les difficultés d’accessibilité dans les bâtiments et les lieux publics (2004) » Campagne 2020 ASPH

Une personne interviewée

Je crois que le nerf de la guerre c’est toujours les budgets hein. Et qu’en matière d’accessibilité c’est vrai que les concepteurs n’ont pas toujours compris que ça ne coûte pas plus cher de construire accessible, à partir du moment où on le conçoit dès le départ.

Voix off

Une loi de 1975 impose des normes d’accessibilité aux locaux publics. Mais dans de trop nombreux cas, des permis de bâtir sont toutefois accordés sans qu’elles soient respectées.

Journaliste

Un premier témoignage, celui de Chantale Wauthier, habitant Sambreville et se trouvant momentanément en fauteuil roulant. « Je rage » dit-elle « de voir les difficultés que peuvent rencontrer les personnes handicapées. Où que je me rende, il n’y a pratiquement pas de facilités. J’ai dû à maintes reprises me lever de mon fauteuil en raison de la hauteur de trottoirs ou en raison de l’inaccessibilité de nombreux magasins. » Alors Monsieur Snoeck, est-ce qu’effectivement de nombreux lieux publics sont difficilement accessibles aux personnes handicapées ?

Vincent Snoeck –  Directeur ASBL GAMMA

Malheureusement c’est encore quelque chose que l’on rencontre beaucoup trop souvent. Et ce témoignage est intéressant puisque cette personne dit qu’elle est en chaise roulante de façon temporaire. Donc ça nous rappelle que, effectivement, ça peut nous arriver à tous à un moment ou un autre. Ce qui fait que la tranche de la population qui est concernée peut devenir très très grande. Alors par rapport aux bâtiments bien sûr trop souvent on rencontre des marches à l’entrée, trop souvent lorsqu’on arrive à passer le cap de l’entrée, la circulation à l’intérieur du bâtiment n’est pas suffisante. On l’a vu dans le sujet, des personnes qui allaient dans de grandes surfaces, effectivement si elles rentrent facilement dans les rayons il n’est pas évident de trouver ou d’atteindre ce que l’on veut acheter. Et ensuite l’utilisation même de l’équipement qui est prévu dans le bâtiment est trop souvent mauvaise.

Et on rencontre encore beaucoup, beaucoup de difficultés sur les trottoirs puisque les cheminements, ce qu’on appelle les cheminements piétons ils sont utilisés aussi par toutes les personnes handicapées bien sûr, sont bien souvent trop peu larges, les bordures ne sont pas suffisamment, de façon régulière, abaissées, ou alors on trouve un abaissement de bordure d’un côté de la route et de l’autre côté on ne sait pas remonter. Et puis bien sûr il y a tous les obstacles de comportements. Puisque sur le trottoir on peut rencontrer des poteaux, des poubelles, des voitures stationnées, etc.

Journaliste

Et il n’y a pas que les chaises roulantes dont vous parliez, il y a également les personnes malvoyantes ou non voyantes dont vous faites partie. Vous nous avez d’ailleurs apporté un autocollant qui pourra être apposé dès l’année prochaine, à la devanture des magasins ou des lieux publics qui accepteront les chiens d’assistance, ce sont donc les chiens pour aveugles. Est-ce qu’il y a de nombreux magasins ou de nombreux lieux publics aujourd’hui où on ne peut pas entrer en compagnie d’un chien d’assistance ?

Vincent Snoeck – ASBL GAMMA

Ça arrive encore trop régulièrement. Et la grosse difficulté c’est que la personne aveugle qui se voit  refuser l’entrée d’un magasin avec son chien guide ben que peut-elle faire à part faire demi-tour ou devoir convaincre la personne que son chien est un chien bien dressé, respectueux du matériel qu’il va rencontrer à l’intérieur, etc. ? Donc il y a une campagne qui va être lancée par l’ASBL Entrevue, qui est une école qui dresse des chiens guides, pour promouvoir l’accessibilité des chiens d’assistance ce qui comprend les chiens guides, mais également les chiens pour personnes qui sont en voiturette et d’autres types de chiens d’aide en fait.

Journaliste

Merci. Un nouveau témoignage celui d’une téléspectatrice qui nous écrit : « Je dois régulièrement me rendre au CHR de Liège en chaise roulante et je me rends compte que rien n’est fait pour les personnes handicapées. Les guichets d’inscription sont trop hauts et il y a peu de toilettes assez larges pour les chaises roulantes. Comment cela n’a-t-il pas été pensé lors des aménagements ? » Alors Madame Marlière même dans les hôpitaux, qui à priori sont censés être adaptés aux personnes qui ont des difficultés; même dans les hôpitaux on constate que l’accessibilité n’est pas toujours présente.

Gisèle Marlière – Présidente nationale de l’Association Socialiste de la Personne Handicapée

Oui tout à fait. Parce qu’elle n’est pas présente dans l’esprit des concepteurs. Le problème, le manque de possibilités de déplacement, la difficulté du déplacement, n’est pas présente à l’esprit des gens qui sont valides. Et donc cette ce problème n’est pas pris en compte au point de départ. Maintenant c’est vrai que nous devons constater que de plus en plus, grâce notamment au travail d’associations comme les nôtres, que ce soit celle de Monsieur Snoeck,  la nôtre ou d’autres, effectivement il y a des gens qui prennent conscience. Mais l’intervenant, tout à l’heure dans le petit film que vous avez passé, montre bien, et c’est une réalité, ça a encore été remis en évidence en Europe ce week-end-ci, c’est qu’effectivement si on y pense dès le point de départ, c’est nettement moins coûteux que de devoir rectifier par après.

Journaliste

Alors en Belgique, depuis plusieurs années maintenant, la moitié des communes à peu près, ont signé une charte dans laquelle ils s’engagent à améliorer l’accessibilité des lieux publics. Alors en quelques mots où en sommes-nous ? Et est-ce qu’on peut dire que les choses avancent ?

Gisèle Marlière

C’est vrai que notre association, donc l’Association Socialiste de la Personne Handicapée, a lancé une charte communale d’intégration de la personne handicapée en 2001. C’est vrai que, aujourd’hui, plus de la moitié des communes ont signé cette charte, en Belgique. C’est vrai que plus de la moitié de ces signataires ont rentré un pré bilan. Et donc, c’est un des domaines dans lequel les communes s’investissent sans doute le plus.

Journaliste

Et ça s’améliore ?

Gisèle Marlière

Ça s’améliore. Mais bon il faut être vigilant et aller voir sur place. Parce que la conception de cas, une  personne valide ou un service technique de l’accessibilité de l’accessibilité, et la réalité en tous cas les réels besoins des personnes handicapées, il y a quelques fois de la marge.

Journaliste

Anne de Charleroi cette fois-ci nous dit : « Je trouve que les transports en commun sont vraiment inaccessibles aux handicapés. Surtout les trains. » dit-elle. « Les marches sont tellement hautes. Comment un handicapé peut-il voyager en Belgique ? » Monsieur Snoeck il est effectivement difficile de se déplacer en transports en commun lorsqu’on est une personne handicapée ?

Vincent Snoeck

Oui, il est difficile. Alors on peut noter qu’il y a une amélioration dans l’aménagement des bâtiments donc c’est-à-dire les gares, les stations de métro. Ça commence à évoluer. À Bruxelles, on a de plus en plus de stations de métro qui bénéficient d’un ascenseur, qui bénéficient d’adaptations tactiles pour les déficients visuels. Dans les gares aussi ça commence à arriver. Mais malheureusement une personne en voiturette ne peut, encore actuellement, absolument pas prendre le train toute seule. Elle doit faire appel aux services, qu’on va appeler le service bagages, donc pour pouvoir obtenir un élévateur qui va la mettre dans le train. Dans le train elle aura 1 ou 2 places éventuellement qui sont disponibles pour elle. Il faudra qu’il y ait quelqu’un à l’arrivée pour descendre la voiturette et pour l’aider à sortir de la gare. Et il faut savoir que c’est arrivé à de nombreuses personnes en voiturette, de prendre le train et de ne pas pouvoir descendre à son arrêt puisque le personnel qui devait être là n’était pas à disposition à ce moment-là. Donc ce que l’on demande c’est de l’autonomie bien sûr. Et  le témoignage de la personne va surement dans ce sens-là. C’est : « Je voudrais pouvoir me déplacer seule dans les transports en commun, sans devoir compter tout le temps sur quelqu’un » puisque le facteur humain, on le sait, n’est pas toujours présent.

Journaliste

Et pour les trams et les bus, bien entendu, il n’y a pas d’élévateurs, Madame Marlière ?

Gisèle Marlière

Non, non. Pas du tout. Pas du tout, et c’est vrai que on sent que les pouvoirs publics semblent plus disposés qu’avant à rencontrer cette problématique. Mais, d’une part, il y a l’investissement financier, qu’ils nous mettent en évidence, toujours, la première chose. Et la deuxième chose, c’est que, ce qui n’est pas dit officiellement, et c’est vrai tant pour la SNCB que pour les transports urbains, c’est que il y a un facteur temps. Les personnes handicapées sont considérées comme faisant perdre du temps et ne permettant pas de respecter les horaires. Nous l’avons trouvé dans des notes internes. Et donc on conseille, d’ailleurs c’est devenu presque officiel puisque, et je rebondis sur la SNCB, la brochure à l’intention des personnes handicapées conseille officiellement de ne pas prendre les transports en commun aux heures de pointe. En clair, ça veut dire que les personnes handicapées n’ont pas droit au même créneau de socialisation que les autres.

Journaliste

Bien. Une question de Madame Hendrickx qui habite Celles, c’est près de Tournai. C’est une question par téléphone. Nous l’écoutons.

Madame Hendrickx

Je voudrais faire savoir que pour les handicapés on se fait souvent insulter quand on demande pour pouvoir passer à une caisse qui est pour handicapé. Les parkings pour voiture 9 fois sur 10 sont occupés par des gens non handicapés ou avec de toutes anciennes cartes, les cartes jaunes, qui ne sont plus valables déjà depuis 2 ans. On se fait insulter de tous les côtés. Les uns nous disent qu’on a pas besoin de faire nos courses à cette heure-là. D’autres nous disent que c’est facile ça d’être handicapé et que ci et que là. Mais je voudrais bien les voir à ma place.

Journaliste

Donc c’est une personne qui nous dit les places réservées pour personnes handicapées sont généralement occupées par les personnes tout à fait mobiles. C’est un comportement que l’on rencontre souvent ?

Gisèle Marlière

C’est vrai que c’est un comportement que l’on rencontre encore. Et encore de façon trop importante. Maintenant, je trouve que depuis 10 ans, et certainement depuis les 5 dernières années, il y a quand même une meilleure prise en compte du respect de ces emplacements. Mais c’est vrai que encore aujourd’hui on voit, et c’est malheureux, que certaines personnes handicapées ont gardé d’anciennes cartes qui ne sont plus valables Et si je peux répondre à la personne, c’est qu’en fait, ces cartes ne sont plus valables, et donc l’autorité publique a le droit d’intervenir et de reprendre cette carte. Ça c’est déjà une chose. Vous devez savoir que, probablement, un des plus gros problèmes aujourd’hui, c’est le nombre de places le nombre de places, parce que il faut constater que quand il y a 1 ou 2 places à un emplacement de parking dans de grandes surfaces c’est pas suffisant. Maintenant, de nouveau je vous dis, sur quelques années on a vu, de toutes grandes surfaces effectivement, être nettement plus attentives au nombre de places, à la largeur, parce que ce n’est pas tout d’avoir un emplacement trop étroit ne sert à rien. Nous avions fait une campagne l’an dernier « Parking courtois ». D’autres associations ont suivi dans le même créneau.  Et effectivement ça donne des résultats. Il faut savoir aussi, et ça je voudrais quand même faire un petit aparté, c’est que Madame dit on voit des personnes qui ne sont pas handicapées attention quand même que le handicap, même de mobilité, ne se voit pas nécessairement. On a des personnes, effectivement, en chaise, en voiturette qui ont des problèmes de mobilité, mais d’autres personnes vivent un problème de mobilité et ça ne se voit pas.

Journaliste

Bien. On passe rapidement à une nouvelle question de Madame Marchal. C’est également par téléphone.

Madame Marchal

J’ai un fils qui actuellement suit l’enseignement normal mais il est dans une voiturette. Et nous rencontrons fréquemment le problème des établissements non adaptés. Or il n’est pas scolarisable dans une école spécialisée. Et on trouve difficilement des bâtiments adaptés aux personnes handicapées.

Journaliste

Monsieur Snoeck, rapidement il nous reste assez peu de temps, l’école n’est pas adaptée généralement aux personnes handicapées ?

Vincent Snoeck

Oui l’école est un lieu qui rencontre encore beaucoup de difficultés. Et effectivement nous avons été mandatés, cette année, par le Ministre Nollet, pour faire une étude sur l’accessibilité de plusieurs écoles en Wallonie. Et alors nous avons utilisé pour cela une méthode d’évaluation qui s’appelle   » l’indice passe-partout « . Qui est une méthode qui permet de donner un degré d’accessibilité en tenant compte de 6 catégories de personnes à mobilité réduite. Et donc on parle des personnes en chaise roulante, celle qui sont en chaise roulante accompagnée, celle qui marche debout et qu’on ne voit pas justement.

Journaliste

On va devoir… Oui, oui merci. Donc il va y avoir un indice qui va permettre d’évaluer l’accessibilité ?

Vincent Snoeck

Qui permettra justement de donner les informations pour les utilisateurs.

Journaliste

Merci à tous les deux d’avoir été nos invités.